A Houston, le réservoir s’est mué en galerie d’art

Source principale d’alimentation en eau potable de la ville du Texas durant plus d’un demi-siècle, le réservoir souterrain de Houston faillit être détruit en 2010. Frappée par son architecture, une association est parvenue à lui donner une nouvelle vie.

En 2010, la mairie de Houston prit la décision de régler un dossier devenu embarrassant, celui du réservoir souterrain désormais inutile. Construit en 1926 avec l’objectif d’alimenter en eau potable la plus grande ville du Texas, cet équipement public remplit parfaitement son office durant une cinquantaine d’années, avant qu’une mystérieuse fuite – que les ingénieurs ne purent jamais identifier – ne vienne réduire progressivement son rôle.

Définitivement fermé en 2007, le site fut laissé à l’abandon et promis à une démolition certaine, encouragée par l’appétit des promoteurs immobiliers. « Au même moment, l’association ‘Buffalo Bayou Partnership’ (BBP) développait un projet de 58 millions de dollars pour la rénovation et d’expansion du parc urbain en entrée du centre-ville », explique Trudi Smith, membre de BBP, chargée de la programmation des événements. « La municipalité prit donc la décision de nous céder ses droits de propriété sur le réservoir, afin que nous puissions convertir en parking. »

Toutefois, lorsque les consultants missionnés par BBP descendirent dans les entrailles de cette citerne capable de contenir 57 millions de litres d’eau, ils furent immédiatement frappés par son extraordinaire beauté. « Le site donne le sentiment de plonger dans une caverne aménagée par les architectes de l’Empire Romain. »

Quasiment aussi grand que deux terrains de football et parsemé de 221 colonnes de huit mètres de haut, ce réservoir de 8 200 m2 modifia instantanément les projets de l’association. « Nous avons été estomaqués par la superficie et son intensité architecturale », ajoute Anne Olson, présidente de BBP. « Nous avons eu un véritable coup de cœur. Dès lors, détruire une telle construction devenait impossible. »

Dans cette citerne souterraine où l’écho de chaque claquement de main résonne durant 17 secondes, l’association Buffalo Bayou Partnership mit tout en œuvre pour lui donner une nouvelle vie, s’appuyant sur l’expertise de plusieurs architectes locaux. Grâce à un don de 1,7 million de dollars, le reste d’eau croupissante fut évacué et le reste du site assaini, avant qu’une mise aux normes ne soit entreprise afin d’accueillir le public. « En effet, l’idée nous est vite venue à l’esprit d’ouvrir le réservoir aux visiteurs. Il s’agit d’une cathédrale de son et de lumière que nous devions absolument partager avec la population. »

Rebaptisé « The Cistern » (N.D.L.R., la Citerne) et aménagé à la suite de plusieurs mois de simulations sur logiciels en trois dimensions, le site a enfin pu ouvrir ses portes en mai 2016. Dédié à l’exposition de créations artistiques contemporaines et éphémères, permettant aux artistes d’utiliser librement l’espace mis à leur disposition, le réservoir souterrain souhaite devenir l’un de lieux emblématiques de l’art américain moderne.

« Nous avons mis en place une campagne ambitieuse pour nous faire connaître et pour attirer les créateurs », poursuit Anne Olson. « Nous sommes heureux de pouvoir partager la beauté et la rareté de cette infrastructure qui a, Durant des décennies, abreuvé les habitants de Houston. »

Depuis décembre 2016 et jusqu’en juin 2017, l’artiste Magdalena Fernández expose ses jeux de lumières, mais BBP envisage également d’organiser des concerts au cours de l’été. À condition de trouver la musique adéquate pour s’adapter l’acoustique particulière des lieux.

Et pour ceux dont la claustrophobie les empêche d’apprécier l’art sous terre, un périscope a été mis en place afin d’apprécier l’architecture originale du réservoir.

Un bel exemple de planification et revitalisation urbaine, qui propose d’allier le passé, le présent et le futur.

Stéphane Cugnier

Article similaire publié dans l’Edition du soir du quotidien « OUEST FRANCE », le vendredi 13 janvier 2017

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